Quatrième semaine
Introduction:
Au cours de la quatrième semaine, les feuillets
mis en place au cours de la troisième semaine se différencient pour constituer
les ébauches de la plupart des grands organes du corps. Dans le même temps, le
disque embryonnaire subit une plicature qui est à l'origine de la forme de base
du corps d'un vertébré. Nous décrirons ici la différenciation des structures
apparues le long de l'axe de l'embryon au cours de la troisième semaine, à
savoir les somites et la plaque neurale. Les somites continuent à s'isoler du
mésoblaste paraaxial en progressant dans le sens crânio-caudal, jusqu'au jour
30. Dans le même temps, les somites se subdivisent, à partir de la région
cervicale, en trois types d'ébauches: les myotomes, les dermatomes et
les sclérotomes. Les myotomes sont à l'origine de la musculature segmentaire
du dos et de la paroi antéro-latérale du corps; les dermatomes forment le derme
du scalp, du cou et du tronc; les sclérotomes donnent naissance aux corps et
aux arcs vertébraux tout en contribuant également à la constitution de la base
du crâne. Au cours de la quatrième semaine, un processus d'invagination, appelé
neurulation, transforme la plaque neurale en un cylindre creux, le tube
neural, qui s'enfonce dans la paroi du corps et qui commence à se
différencier en cerveau et moelle épinière. Les parties les plus caudales du
tube neural paraissent se constituer par un processus distinct de neurulation
secondaire impliquant l'éminence caudale, mésoblastique. Déjà avant la fin
de la quatrième semaine, il est possible d'identifier les grandes régions du
cerveau; de même, les neurones et la glie commencent à se différencier à partir
du neuro-épithélium du tube neural. Au moment de la neurulation, une collection
spéciale de cellules, la crête neurale, se détache des lèvres latérales
de la gouttière neurale pour migrer en de nombreux endroits du corps et s'y
différencier en un grand nombre de structures et de types cellulaires. A
l'exclusion de quelques ganglions sensoriels des nerfs crâniens, les ganglions
du système nerveux périphérique dérivent de la crête neurale. Les ganglions
de la racine dorsale se condensent près de la moelle épinière, en rapport
avec les somites. Ces ganglions contiennent les neurones sensitifs qui
relayent, vers le système nerveux central, les informations perçues par les
récepteurs somatiques. Une série de ganglions réunis dans la chaîne
sympathique se développe tout le long de la moelle épinière; en outre,
quelques ganglions sympathiques prévertébraux apparaissent en
relation avec les branches de l'aorte abdominale. Ces ganglions contiennent les
neurones périphériques de la voie sympathique bineuronale et ils reçoivent des
influx des fibres sympathiques centrales issues de la moelle épinière
thoraco-lombale. Les neurones périphériques du système parasympathique se
trouvent dans les ganglions parasympathiques qui se développent en association
avec les nerfs crâniens. Ces ganglions sont en connexion avec les fibres
parasympathiques centrales issues du mésencéphale, du rhombencéphale et de la
moelle sacrale. Les cellules de la crête neurale sont également à l'origine de
nombreuses structures non neuronales, notamment les mélanocytes de l'épiderme,
certains constituants du coeur et les cartilages des arcs pharyngiens.
· Les somites
se différencient en sclérotomes, myotomes et dermatomes
Les cellules des sclérotomes migrent pour
entourer la notochorde et le tube neural
Très rapidement après sa constitution, chaque
somite se subdivise pour donner naissance à des constituants mésoblastiques
spécifiques. Les premiers d'entre eux sont les sclérotomes, ils sont à
l'origine des vertèbres et ils se constituent de la manière suivante. Chaque
somite nouvellement formé se creuse d'une cavité centrale laquelle va être
occupée par une population de cellules disposées en cordons lâches
. Le somite se rompt ensuite, sur son versant médial, et ses cellules,
avec quelques autres, issues de la paroi ventromédiale du somite, migrent en
direction de la notochorde et du tube neural en voie de développement. Cet
ensemble constitue le sclérotome. La portion ventrale de celui-ci entoure la
notochorde et est à l'origine de l'ébauche du corps vertébral; la portion
dorsale se dispose autour du tube neural et forme l'ébauche de l'arc vertébral.
Des expériences de transplantation ont permis de montrer que les cellules du
sclérotome se différencient pour donner naissance soit au corps vertébral, soit
à l'arc vertébral, en réponse à des substances inductrices spécifiques. Les
corps vertébraux apparaissent en réponse à des substances produites par la
notochorde, alors que les arcs vertébraux sont des réponses à des substances
venant du tube neural. Des molécules, telles la chondroïtine sulfate, sécrétées
par la notochorde, semblent être des inducteurs particulièrement puissants pour
la formation du cartilage dans le sclérotome. Les sclérotomes segmentaires
se séparent et se reconstituent pour former les ébauches
vertébrales intersegmentaires. Les nerfs spinaux se développent segmentairement
c'est-à-dire que chacun d'eux émerge au même niveau que le somite
correspondant. Etant donné que les arcs vertébraux entourent complètement le
tube neural pendant la période au cours de laquelle émergent les nerfs spinaux,
on pourrait s'interroger sur la manière dont ceux-ci s'échappent du canal
vertébral. Subsidiairement, il faut se demander pourquoi huit sclérotomes
cervicaux forment sept vertèbres cervicales alors que dans le reste de la
colonne vertébrale, il y a correspondance exacte entre le nombre des
sclérotomes et celui des vertèbres. La réponse à ces questions est que les sclérotomes
se fendent et se reconstituent pour former des rudiments de vertèbres à
topographie intersegmentaire. Le processus est illustré dans la figure
4-2. Tout en migrant en direction de la notochorde et du tube neural, le
sclérotome se partage en deux moitiés, une crâniale et une caudale, et la
moitié caudale de chaque sclérotome fusionne avec la moitié crâniale du
suivant. Cet assemblage poursuit ensuite son développement en direction de la
notochorde et du tube neural pour donner naissance à des vertèbres disposées de
manière intersegmentaire. Sept vertèbres cervicales naissent de huit somites
parce que la moitié crâniale du premier sclérotome cervical fusionne avec la
moitié caudale du quatrième sclérotome occipital pour entrer dans la
constitution de la base du crâne . La moitié caudale
du premier sclérotome cervical s'unit ensuite à la moitié crâniale du second
sclérotome cervical pour former la première vertèbre cervicale (atlas) et ainsi
de suite. Le huitième sclérotome cervical participe à la constitution de la
septième vertèbre cervicale par sa moitié crâniale et à la première vertèbre
thoracique, par sa moitié caudale. Cette nouvelle segmentation des sclérotomes
a pour résultat de permettre aux nerfs spinaux segmentaires d'émerger entre les
vertèbres. Il convient cependant de se rappeler que s'il y a sept vertèbres
cervicales, il y a néanmoins huit nerfs spinaux cervicaux. Le premier de
ceux-ci passe entre la base du crâne et la première vertèbre cervicale et, par
conséquent, le huitième se trouve au-dessus de la première vertèbre thoracique.
A partir de là, chaque nerf spinal émerge juste en dessous de la vertèbre de
même numéro . Les disques fibreux intervertébraux sont
disposés segmentairement, entre les corps vertébraux .
Le noyau original de chaque disque, le nucléus pulposus, est constitué
de cellules originaires de la notochorde alors que l'anneau Fibreux qui
l'entoure se développe à partir des cellules abandonnées par les sclérotomes
dans la région de leur division au cours de leur resegmentation.,
le nucléus pulposus est probablement remplacé ultérieurement par des cellules
issues des sclérotomes.
Les myotomes et les dermatomes se
développent à des niveaux segmentaires
La portion de somite qui reste en place après
la migration du sclérotome en direction médiale, appelée dermatomyotome, se
sépare rapidement en deux parties, le dermatome et le myotome
. Les dermatomes sont à l'origine du derme (graisse et tissu
conjonctif) du cou, du dos et de la partie ventro-latérale du tronc. Cependant,
comme indiqué dans le chapitre 14, la plus grande partie du derme dérive de la
lame mésoblastique somatopleurale latérale. Les myotomes se différencient en
cellules myogènes (productrices de muscles). Chaque myotome se partage en deux
parties: une dorsale ou épimère et une ventrale ou hypomère. Les
épimères sont à l'origine des muscles épi-axiaux profonds du dos y compris
l'érecteur du rachis et le groupe transversaire épineux. Les hypomères donnent
naissance aux muscles hypo-axiaux des parois ventrale et latérale du thorax et
de l'abdomen . Ces muscles comprennent les trois plans
des intercostaux, au niveau du thorax, et les trois couches homologues de
l'abdomen (muscles oblique externe, oblique interne et transverse de l'abdomen)
ainsi que le muscle droit de l'abdomen
· La plaque
neurale se différencie en encéphale et moelle épinière et elle se creuse pour
former le tube neural
La future moelle épinière et les divisions
de l'encéphale sont visibles dans la plaque neurale au début de la quatrième
semaine. Au début de la quatrième
semaine, la plaque neurale comprend une portion crâniale large, à l'origine de
l'encéphale, et une portion caudale, étroite, qui donnera
la moelle épinière. Aux environs du jour 22, l'extrémité céphalique de
l'embryon commence à s'infléchir à angle aigu, en direction ventrale. Cette
inflexion marque l'endroit d'apparition du futur mésencéphale ou cerveau moyen
et elle est appelée courbure céphalique. La portion de cerveau située
crânialement à celle-ci deviendra le prosencéphale ou cerveau antérieur
et la portion s'étendant caudalement à elle formera le rhombencéphale ou
cerveau postérieur. Ce dernier, déjà à ce stade précoce de la différenciation,
apparaît divisé en segments par de discrètes constrictions. Ces segments sont
dits neuromères ou, plus précisément, rhombomères.
La formation du tube neural commence au jour 22, à hauteur des cinq premiers somites
Un des événements majeurs de la quatrième semaine est représenté par la
transformation de la plaque neurale en un tube : processus d'invagination
appelé neurulation. Celle-ci commence lorsque la plaque neurale amorce son
incurvation ventrale le long de son axe médian. Cette incurvation se développe
le long du sillon neural médian. Ce sillon neural qui paraît se développer en
réponse à une induction de la notochorde voisine, agit comme une région
charnière et les deux épais plis neuraux tournent autour de lui comme les pages
d'un livre que l'on ferme . Les plis neuraux
deviennent concaves au cours de leur rotation de sorte que leurs lèvres
latérales se rencontrent dorsalement pour former un tube circonscrivant un
espace, le canal neural. Lorsque les lèvres du tube neural fusionnent,
la jonction entre le neuro-épithélium et l'ectoblaste superficiel adjacent est
attirée dorsalement et les bords en regard de l'ectoblaste superficiel se
rencontrent également. Dès que cette jonction s'est effectuée, le tube neural
s'isole de l'ectoblaste et il s'enfonce dans la paroi dorsale du corps. Un
certain nombre de forces paraissent, apparemment, s'unir pour permettre à la
plaque neurale de se creuser en gouttière. Il a été suggéré que la croissance
rapide de l'axe embryonnaire étire mécaniquement la plaque neurale et que cette
action obligerait celle-ci à se plier de la même manière que l'étirement d'une
feuille élastique la contraint à se déformer. D'autres forces qui contribuent
probablement à l'incurvation peuvent naître de la croissance différentielle de
régions spécifiques du neurectoblaste, de changements dans la conformation des
cellules neuro-épithéliales et de l'activité des éléments cytosquelettiques et
cytomusculaires tels que les microtubules et les microfilaments.
· La
fermeture du tube neural procède de manière bidirectionnelle et elle se
termine par l'oblitération des neuropores rostral et caudal
Les lèvres des plis neuraux se rejoignent
d'abord, au jour 22, dans la région des cinq premiers somites
. Le canal neural nouvellement formé communique avec la cavité
amniotique, à chaque extrémité, par de larges ouvertures, les neuropores
rostral et caudal. Les plis neuraux peuvent fusionner initialement
en différents points séparés de la région occipitale mais les petites
ouvertures intermédiaires se ferment rapidement pour constituer un canal
continu. Les neuropores rostral et caudal se réduisent progressivement, au fur
et à mesure que progresse la neurulation. Le neuropore rostral se ferme au jour
24 et le caudal, au jour 26. La fermeture du neuropore rostral est, en fait,
bidirectionnelle et elle se termine dans la région du futur cerveau antérieur.
La fermeture du neuropore caudal s'opère strictement dans le sens crânio-caudal
pour s'achever à hauteur du second segment sacral (niveau du somite 3 1).
· La partie
la plus caudale du tube neural paraît se former par neurulation
secondaire à partir de l'éminence caudale
Le tube neural résultant de la fermeture du
neuropore caudal se termine à hauteur du somite 3 1. Comment se forment alors
les portions les plus caudales du tube neural, les niveaux sacraux inférieurs
et les coccygiens? A savoir que la gastrulation, par le retrait de la ligne
primitive, est à l'origine, au jour 20, de l'éminence caudale mésoblastique.
Les études expérimentales aussi bien que l'examen d'embryons humains supportent
l'hypothèse suivant laquelle c'est l'éminence caudale et non la plaque neurale
qui est à l'origine de la partie caudale du tube neural et de l'extension
caudale de la moelle épinière . Ce processus est
appelé neurulation secondaire. Apparemment, une masse tissulaire
centrale, aux potentialités multiples, commence par former un cordon neural au
sein de l'éminence caudale. Ce cordon se creuse ensuite, le long de son axe
central et la lumière nouvellement formée s'unit au canal neural. La constitution
de l'extrémité caudale du tube neural est terminée après six semaines de
développement.
· Les
cellules de la crête neurale naissent des plis neuraux, migrent vers des
régions spécifiques du corps et sont à l'origine de nombreuses structures.
Les cellules des crêtes neurales se détachent
des lèvres des plis neuraux au cours de la neurulation. La crête neurale est
une population spéciale de cellules qui se détachent le long des bords latéraux
des plis neuraux. Au cours de la neurulation, ces cellules se détachent de la
plaque neurale et migrent vers de nombreux endroits du corps où elles se
différencient en une remarquable variété de structures .
Les cellules de la crête neurale se différencient d'abord dans la zone
mésencéphalique et, ultérieurement, dans les régions plus caudales et plus
rostrales. Dans la portion du tube neural correspondant à la moelle épinière,
les cellules de la crête neurale se détachent au moment où les lèvres latérales
fusionnent en un tube. Par conséquent, l'isolement et la migration de ces
cellules de la crête neurale s'effectuent suivant une onde crânio-caudale,
débutant, au jour 22, à hauteur de l'extrémité crâniale du tube neural à
l'origine de la moelle épinière . Apparemment, ce
dernier pourrait produire un peu de crête neurale, même après la fermeture du
neuropore caudal, au jour 26. A l'inverse, les cellules de la crête neurale
céphalique, associées au cerveau en voie de développement, se détachent et
migrent avant la fermeture du neuropore rostral, même lorsque les plis
neuraux sont encore largement ouverts.
La crête neurale céphalique est à
l'origine de diverses formations
de la tête et du cou. La crête neurale donne également la pie-mère et
l'arachnoïde de la région occipitale.
Les cellules de la crête neurale des régions
du mésencéphale et du rhombencéphale forment également des structures
appartenant aux arcs pharyngiens en voie de développement. Ces
structures comprennent des rudiments cartilagineux de différents os du nez, de
la face, de l'oreille moyenne et du cou. Il s'agit également du derme, des
muscles lisses. La crête neurale du niveau rhombencéphalique contribue aussi à
la formation de certains ganglions des nerfs crâniens. Ses cellules donnent
encore les neurones et les éléments gliaux des ganglions parasympathiques des
nerfs crâniens VII, IX et X ainsi que des ganglions sensitifs ou sensoriels des
nerfs crâniens V, VII, VIII, IX et X.
La crête neurale des régions occipitale et spinale produit également des constituants essentiels
du système nerveux périphérique Le système nerveux périphérique du cou, du
tronc et des membres comprend les trois types suivants de neurones: les
neurones sensitifs périphériques, dont les corps cellulaires sont situés dans
le ganglion de la racine dorsale, et les neurones moteurs périphériques,
parasympathiques et sympathiques, dont les corps cellulaires occupent,
respectivement, les ganglions parasympathiques et sympathiques. Ces trois types
de neurones périphériques, avec leurs éléments gliaux associés, dérivent des
cellules de la crête neurale. Le présent chapitre traite de leur origine.
Les ganglions de la racine dorsale
dérivent de la crête neurale
spinale. Quelques cellules de la crête neurale provenant du tube neural
spinal restent dans l'espace compris entre le versant dorsal de ce dernier et
les somites en voie de développement; elles y forment des petits amas en
rapport avec ces derniers . Ces amas se différencient
ensuite pour donner naissance, segmentairement, aux ganglions des racines
dorsales des nerfs spinaux; ils contiennent les neurones sensitifs qui
conduisent les influx vers la moelle épinière à partir des terminaisons
nerveuses contenues dans les organes, les viscères, la paroi du corps et les
membres. Des expériences réalisées à l'aide des chimères caille-poulet ont
permis d'établir que la plupart des cellules de chaque ganglion dérivent du
niveau correspondant du tube neural bien que certaines d'entre elles puissent
tirer leur origine de la crête neurale adjacente à la portion caudale du somite
précédent. Il a pu être établi que les cellules migratoires des crêtes neurales
se déplacent de préférence à travers la moitié crâniale des sclérotomes.
L'expérience a démontré à l'évidence que la survie et la différenciation des
ébauches des ganglions des racines dorsales peuvent dépendre d'une petite
protéine, appelée " brainderived neural growth factor (BDNF) sécrétée
par le tube neural adjacent. Une paire de ganglions des racines dorsales se
constitue au niveau de chaque segment à l'exception du premier cervical et des second
et troisième coccygiens . Il y a, par conséquent, 7
paires cervicales, 12 thoraciques, 5 lombales, 5 sacrales et 1 coccygienne. La
première paire de ganglions des racines dorsales (adjacente au second somite
cervical) apparaît au jour 28 et les autres, au cours des quelques jours
suivants, en suivant l'ordre crânio-caudal.
Les neurones postganglionnaires
parasympathiques dérivent des crêtes neurales occipito-cervicale et sacrale. Quelques neurones moteurs périphériques du système
nerveux autonome parasympathique à " deux neurones " tirent leur
origine des cellules des crêtes neurales qui migrent dans les parois des
viscères en voie de développement, tels le coeur, l'estomac, la vessie. Les
corps cellulaires de ces neurones se trouvent dans les ganglions
parasympathiques périphériques destinés à fournir l'innervation motrice
parasympathique aux viscères adjacents. Les cellules des crêtes neurales nées
dans la région occipito-cervicale du tube neural (la " région vagale
") se déplacent à travers le mésenchyme de la paroi du tube digestif pour
innerver toutes les portions de celui-ci, depuis l'œsophage jusqu'au
rectum. Les cellules des ganglions parasympathiques des régions les plus
inférieures du tube digestif ont toutefois une double origine: quelques-unes
proviennent de la crête neurale occipito-cervicale mais les autres sont issues
de la crête neurale sacrale. Les ganglions parasympathiques périphériques
contenus dans la paroi du tube digestif et leurs dérivés (rassemblés sous le
nom collectif de ganglions entériques sont en connexion avec le
système nerveux central par l'intermédiaire d'axones qui cheminent soit par le
nerf vague (nerf crânien X), soit par les nerfs spinaux des niveaux sacraux 2,
3 et 4. Le système parasympathique est actif au cours des périodes de
relâchement et il stimule les viscères dans leurs fonctions habituelles de
maintenance et de digestion. Le système parasympathique est dit crânio-sacral,
du fait que ses neurones centraux occupent les régions crâniale et sacrale
du système nerveux central.
Les ganglions de la chaîne sympathique
sont innervés par les fibres
préganglionnaires sympathiques thoraco-lombales. Quelques cellules de la
crête neurale du niveau spinal migrent vers une région située juste au côté
ventral du futur ganglion de la racine dorsale pour y former une série de
condensations à l'origine de la chaîne ganglionnaire du système
sympathique autonome . Dans les régions thoraciques,
Tombale et sacrale, chaque paire de ganglions est en rapport avec une paire de
somites. Dans la région cervicale, il n'y a que trois volumineux ganglions et,
dans la région coccygienne, il n'y en a qu'un seul, au niveau du premier
segment. Les expériences de marquage à l'aide de cellules de caille indiquent
que la crête neurale à l'origine de la chaîne cervicale occupe toute la
longueur du tube neural cervical alors qu'aux niveaux thoracique, lombal et
sacral, les ganglions sont constitués à partir des cellules de la crête neurale
des niveaux correspondants. Contrairement aux ganglions de la racine dorsale,
ceux de la chaîne sympathique ne dépendent pas du BDNF pour leur survie mais
ils peuvent être contrôlés par d'autres facteurs de croissance tel l' insulinelike
growth factor. Les cellules qui se développent dans la chaîne ganglionnaire
deviennent les neurones périphériques du système sympathique à deux neurones.
Ce système assure l'innervation motrice autonome de la plupart des structures
innervées par le système parasympathique et il exerce un contrôle sur les
fonctions involontaires comme le rythme cardiaque, les sécrétions glandulaires
et les mouvements intestinaux. D'une manière générale, le système sympathique
est activé dans les conditions de " combat ou de fuite " et, de ce
fait, il a des effets opposés à ceux du système parasympathique. Comme ce
dernier, le système sympathique est constitué de voies à " deux neurones
": les viscères sont innervés par les axones des neurones sympathiques
périphériques lesquels, à leur tour, reçoivent des axones des neurones moteurs
sympathiques centraux situés dans la moelle épinière. Ces neurones centraux
occupent les douze segments thoraciques et les trois premiers lombaux. Pour
cette raison, le système sympathique est également dit " thoraco-lombal
". Les neurones sympathiques périphériques ne sont pas tous localisés
dans la chaîne ganglionnaire. Ceux de certaines voies sympathiques spécialisées
se développent à partir de cellules de la crête neurale qui se rassemblent près
des grosses branches de l'aorte dorsale . Une paire de
ces ganglions préaortiques ou prévertébraux naît de la crête
neurale cervicale et elle se place à la base du tronc coeliaque. D'autres
ganglions, plus diffus, originaires des cellules des crêtes neurales thoracique
ou lombale, se développent en association avec les artères mésentérique
supérieure, rénales et mésentérique inférieure.
La crête neurale de la moelle
épinière est à l'origine de toute une variété de structures non-neuronales
réparties dans le corps Les cellules des crêtes neurales sont censées être
à l'origine, chez l'homme, des enveloppes méningées interne et moyenne de la
moelle épinière (la pie-mère et l'arachnoïde, respectivement), ainsi que des
cellules gliales des ganglions dérivés de la crête neurale spinale Certains
éléments des crêtes neurales peuvent se différencier en cellules de Schwann à
l'origine des gaines de myéline des nerfs périphériques. D'autres peuvent
également se différencier en cellules neurosécrétrices chromaffines de la
médullaire. Les neurones, la glie et l'épendyme du système nerveux central se différencient
à partir de l'épithélium adjacent au canal neural
Les neuroblastes apparaissent dans la
région du rhombencéphale au jour 24
La différenciation cellulaire du tube neural commence dans la région
rhombencéphalique, juste après la fusion des plis occipito-cervicaux, et elle
s'étend, à la fois, en direction crâniale et en direction caudale, au fur et à
mesure que le tube se constitue. Les précurseurs de la plupart des types
cellulaires du futur système nerveux central - les neurones, certains types de
cellules gliales et les cellules épendymaires qui bordent le canal central de
la moelle épinière ainsi que les ventricules du cerveau - naissent de la
prolifération de la couche de cellules neuro-épithéliales immédiatement
adjacentes au canal neural. Ces cellules prolifératives constituent la couche
ventriculaire du tube neural en voie de différenciation. La première onde
de cellules produites par celle-ci correspond aux neuroblastes, à
l'origine des neurones du système nerveux central. Ils migrent ensuite en
périphérie pour former une nouvelle couche, la zone du manteau, externe
à la couche ventriculaire. Cette couche contenant les neurones devient la
substance grise du système nerveux central. Les prolongements neuronaux qui
s'échappent de la zone du manteau croissent vers la périphérie pour former une
troisième couche, la couche marginale, qui ne contient pas de
corps neuronaux et qui deviendra la substance blanche du système nerveux
central. Les réarrangements de la zone du manteau et de la couche marginale qui
se déroulent au cours de la maturation de la moelle épinière sont relativement
simples; Ils seront décrits dans la section suivante.
· Les
glioblastes et les cellules épendymaires se forment après la cessation
de la formation de neuroblastes
Dès que la couche neuro-épithéliale bordant
le canal neural cesse de produire des neuroblastes, elle donne naissance à un
nouveau type cellulaire, le glioblaste. Celui-ci se différencie en une
grande variété d'éléments gliaux parmi lesquels figurent les astrocytes et
les oligodendrocytes. La glie fournit un support métabolique et
structural aux neurones du système nerveux central. Enfin, la couche
neuro-épithéliale se différencie sur place pour donner les cellules épendymaires
qui bordent les ventricules du cerveau et le canal central de la moelle
épinière. Les épendymes sont responsables de la sécrétion et de la résorption
du liquide cérébro-spinal qui remplit les ventricules du cerveau, le canal
central de la moelle épinière et l'espace sub-arachnoïdien qui entoure le
système nerveux central. Le liquide cérébro-spinal est sous pression: Il
fournit au système nerveux une enveloppe liquidienne qui a pour effet de le
protéger et de le supporter.
· Les
colonnes dorsales et ventrales commencent à se former dans la zone du manteau
de la moelle épinière à la fin de la quatrième semaine
A la fin de la quatrième semaine, les
neuroblastes de la zone du manteau de la moelle épinière commencent à
s'organiser, sur toute l'étendue de cette dernière, en quatre colonnes, une
paire de colonnes dorsales ou alaires et une paire de colonnes
ventrales ou fondamentales (Fig. 4 -17). Latéralement, les colonnes
alaire et fondamentale sont séparées par le sillon limitant; dorsalement
et ventralement, elles sont séparées par des rétrécissements marqués du tissu
nerveux, appelés, respectivement, toit et plancher. Les cellules
des colonnes ventrales deviennent les motoneurones somatiques de
la moelle épinière et ils innervent les structures motrices somatiques comme
les muscles volontaires (striés) de la paroi du corps et des membres. Les
cellules des colonnes dorsales forment des neurones d'association qui
établissent des connexions entre les motoneurones des colonnes ventrales et les
prolongements neuronaux qui vont bientôt pénétrer dans la moelle épinière à
partir des neurones sensitifs des ganglions des racines dorsales. Dans la
plupart des régions de la moelle épinière - au niveau des douze segments
thoraciques, des trois premiers lombaux et des sacraux deux à quatre - les
neuroblastes des parties les plus dorsales des colonnes ventrales s'isolent
pour donner naissance aux cellules des colonnes intermédiolatérales (Fig.
4 -17). Celles-ci, aux niveaux thoracique et lombal, donnent les neurones
moteurs autonomes du système sympathique, alors que dans la région sacrale
elles forment les neurones moteurs autonomes du système parasympathique. Les
structures et les fonctions de ces systèmes seront envisagées dans le chapitre
suivant. En général, à n'importe quel niveau du cerveau ou de la moelle
épinière, les motoneurones se mettent en place avant que les éléments sensitifs
n'apparaissent.